Alors qu’environ 240 millions d’Américains ont le droit de voter aux élections américaines de cette année, un nombre relativement faible de personnes décidera finalement qui sera le prochain président des États-Unis en raison du phénomène connu sous le nom d’« États pivots ». Ces États oscillent entre le soutien au candidat républicain à certains moments et le candidat démocrate à d’autres, comme le reflètent les sondages. Ils sont considérés comme la clé de la Maison Blanche.
Ces États jouent un rôle essentiel dans la détermination du vainqueur de l’élection présidentielle américaine. Il y a sept États pivots dans les élections de 2024 : la Pennsylvanie, le Michigan et le Wisconsin, souvent appelés les États de la Rust Belt, ainsi que l’Arizona, la Géorgie, le Nevada et la Caroline du Nord.
L’imprévisibilité des sondages et l’incertitude quant au candidat qui remportera ces États signifient que la campagne de l’ancien président républicain Donald Trump et de la candidate démocrate et actuelle vice-présidente Kamala Harris travaillent dur pour gagner les électeurs de ces États.
États violets :
Les États pivots sont connus dans le discours politique américain sous le nom d’« États de champ de bataille » ou d’« États violets », où les deux principaux partis bénéficient d’un soutien presque égal parmi les électeurs, les démocrates et les républicains se situant à quelques points de pourcentage l’un de l’autre. Contrairement aux « États sûrs », qui penchent fortement vers le Parti républicain (États rouges) ou le Parti démocrate (États bleus), les États pivots sont caractérisés par ce qui suit :
Changements constants : La principale caractéristique du vote dans ces États est la fluctuation continue, ce qui signifie que les sondages ne parviennent souvent pas à prédire le vainqueur avec précision. Alors que les sondages de juillet 2024 indiquaient que six États pivots – le Nevada, l’Arizona, la Géorgie, le Michigan, la Pennsylvanie et le Wisconsin – penchaient en faveur de Trump (même s’ils ont été cruciaux dans sa défaite contre Biden en 2020), les sondages du mois suivant ont montré que ces États se rapprochaient de la candidate démocrate Kamala Harris.
Une concurrence féroce : Étant donné que les marges entre les candidats sont serrées, ces États sont plus susceptibles d’être le théâtre d’intenses courses à l’échelle de l’État lors des prochaines élections de mi-mandat. Lors des élections présidentielles, de véritables batailles électorales ont lieu dans ces États, chaque campagne faisant tout son possible pour obtenir les votes du collège électoral. La plupart des États utilisent le système du « winner takes all » pour attribuer leurs votes électoraux, ce qui incite les candidats à intensifier leurs campagnes, à consacrer la majorité de leurs publicités et à organiser des rassemblements et des visites dans ces États pour gagner.
Changements au fil du temps : Le statut des États pivots n’est pas permanent. Certains États passent du statut d’États pivots à celui d’États « sûrs », enfermés dans le rôle d’un seul parti, et vice versa. Par exemple, le Nouveau-Mexique et l’Iowa étaient des États pivots lors des élections de 2000 et 2004, mais sont depuis devenus sûrs. De même, l’Arizona et la Géorgie sont passés du statut d’États pivots à celui d’États plus sûrs au cours des deux dernières décennies.
Impact des enjeux électoraux : Les États pivots sont souvent les plus touchés par les questions électorales et les problèmes d’opinion publique américaine. Ces États ont tendance à dominer les discussions dans les primaires des partis, les questions clés étant abordées dans la campagne générale.
Par exemple, les États de la Rust Belt, tels que la Pennsylvanie, le Michigan et le Wisconsin, anciennement connus sous le nom de centres de fabrication lourde, ont été fortement touchés par les crises économiques aux États-Unis. En conséquence, les candidats tentent de séduire les électeurs de ces États en présentant leurs plans pour lutter contre le chômage et rouvrir les usines qui avaient fermé après le déménagement des industries vers des pays comme la Chine et le Mexique.
Facteurs démographiques : Les mouvements de personnes à travers les États-Unis pour l’emploi, la retraite ou d’autres raisons peuvent entraîner des changements démographiques, y compris des changements dans la composition raciale et ethnique d’un État, ainsi que des modèles de migration. Ces facteurs peuvent éventuellement modifier le tissu politique d’un État et les tendances de ses électeurs, poussant parfois un État en territoire pivot.
Le facteur Harris :
Les analystes électoraux prédisent depuis longtemps que la course de 2024 dépendrait d’un petit nombre d’États pivots. Cependant, l’élan démocrate qui a suivi le retrait de l’actuel président Joe Biden et la sélection de sa vice-présidente Kamala Harris comme candidate démocrate a transformé plusieurs États en champs de bataille encore plus compétitifs.
Selon les estimations, avant le retrait de Biden, les sondages montraient que Trump était en tête dans la plupart, sinon la totalité, des sept États pivots. Mais depuis que Harris a pris le relais en tant que candidate démocrate, les modèles de prédiction l’ont de plus en plus favorisée, d’autant plus que sa candidature a dynamisé les jeunes électeurs et les électeurs issus de l’immigration et a eu un impact positif sur l’unité du Parti démocrate, stimulant ainsi ses efforts de mobilisation.
Carte électorale :
Sept États sont devenus le point central pour tous les Américains et les campagnes de Trump et Harris. Ces États détiennent 93 votes électoraux au collège électoral, qui sont susceptibles d’être le facteur décisif dans la victoire de Trump ou de Harris.
Ci-dessous, nous examinons les principales raisons qui expliquent le basculement des votes dans ces États :
L’Arizona et le pari entre l’immigration et l’avortement : L’Arizona est classé comme un État pivot, après avoir été un bastion républicain. Cependant, il a connu une exception lors des élections de 2020 lorsque Biden a brisé le soutien républicain de l’Arizona, remportant l’État avec une marge de 0,3 %. La même chose s’est produite en 1996 lorsque Bill Clinton a remporté l’État lors de sa réélection. Le basculement en Arizona est attribué à deux facteurs principaux : premièrement, l’État connaît une forte diversité démographique, allant des Blancs aux Afro-Américains, en passant par les Amérindiens et les autochtones de l’Alaska. Deuxièmement, le nombre croissant d’électeurs indépendants ou non affiliés joue un rôle. L’Independent Voter Project estime que le pourcentage d’électeurs non affiliés inscrits a atteint environ 29,15 % en novembre 2023.
Si les tendances potentielles du vote semblent déroutantes en raison de facteurs démographiques et partisans, l’immigration et l’avortement sont deux enjeux majeurs qui ont un impact significatif sur le comportement des électeurs lors de l’élection du 5 novembre 2024. Les républicains misent sur cet État frontalier, qui a souffert des politiques d’immigration de l’administration démocrate de Biden. Alors que les habitants de l’Arizona sont frustrés par le nombre croissant d’immigrants, la campagne de Trump espère que l’immigration sera un enjeu décisif pour qu’un tiers des électeurs de l’Arizona soutiennent le Parti républicain. Selon un sondage réalisé en février 2024, l’immigration et l’économie sont des priorités absolues pour les résidents de l’Arizona.
D’autre part, les démocrates parient sur la victoire de l’État en raison des récents sondages montrant que Harris gagne du terrain, en particulier en raison de la question de l’avortement. Elle a devancé Trump dans certains sondages par une marge étroite de 0,7 %. Bien que les républicains soient plus nombreux que les démocrates en termes de membres inscrits (35 % contre 29 %), les républicains sont à la traîne dans les sondages, avec 49 % des résidents de l’Arizona soutenant le droit à l’avortement contre 46 % qui s’y opposent. Cela pousse les démocrates à intensifier leurs efforts pour gagner l’État.
À la lumière de cela, la campagne de Harris a annoncé qu’elle allouerait 50 millions de dollars sur 370 millions de dollars aux États pivots, en particulier pour les publicités en Arizona, tandis que Trump a alloué 2 millions de dollars au même État.
Géorgie : un terrain ouvert pour les candidats : La Géorgie est un excellent exemple d’un État qui passe d’un État sûr à un État pivot. Biden a remporté l’État en 2020 contre Trump, tandis que Trump l’a remporté en 2016 contre Hillary Clinton. En juin 2024, U.S. News a classé l’État comme « égal » pour l’élection présidentielle de 2024, bien qu’un tiers de sa population soit afro-américaine, l’une des plus grandes proportions du pays. Ce groupe démographique a aidé Biden à gagner en 2020. Cependant, les démocrates s’inquiètent d’une baisse de l’enthousiasme pour Biden, avec l’espoir que Harris ravivera le soutien de ce bloc électoral crucial.
Bien qu’un sondage du New York Times de juillet 2024 montre que Trump devance Biden de 49 % à 44 %, un autre sondage indique que Trump ne devance Harris que de 0,6 % en Géorgie, ce qui suggère que l’État reste ouvert aux deux candidats.
Les observateurs estiment que la Géorgie sera un champ de bataille crucial pour les deux candidats. Trump a fait des efforts considérables pour rallier les électeurs, en organisant un grand rassemblement à Rome, en Géorgie, en mars 2024. De l’autre côté, la Géorgie était la première étape de la tournée de campagne de Harris trois jours seulement après la Convention nationale démocrate.
Wisconsin : Difficile à prédire : Autrefois un État solidement bleu, le Wisconsin est devenu un État pivot lorsque Trump l’a remporté de justesse en 2016, marquant la première fois qu’un républicain l’avait emporté depuis 1984. Biden est revenu sur cette tendance en 2020, remportant le Wisconsin contre Trump, renforçant ainsi son statut d’État pivot.
L’importance du Wisconsin en 2024 est renforcée par la décision républicaine d’organiser sa convention nationale à Milwaukee en juillet. De plus, Harris l’a choisi comme le premier État qu’elle a visité après que Biden a annoncé son soutien à sa candidature en juillet.
La Pennsylvanie, avec le Michigan et le Wisconsin, fait partie des États du « mur bleu », qui ont toujours voté pour les démocrates de 1992 jusqu’à la victoire de Trump en 2016. Il a remporté la Pennsylvanie avec seulement 0,7 % d’avance sur Hillary Clinton.
Les observateurs considèrent la Pennsylvanie comme cruciale pour les deux campagnes parce que ses électeurs ont des tendances politiques diverses. Les électeurs urbains, en particulier dans des villes comme Philadelphie, ont tendance à être libéraux, tandis que les électeurs ruraux sont largement conservateurs.
La Pennsylvanie est le plus important des États pivots, avec 19 votes électoraux. Alors que les deux candidats visent à le gagner, la course est serrée. Selon le New York Times d’août 2024, Harris détient une mince avance de 49 % à 48 % sur Trump en Pennsylvanie. La campagne de Trump se concentre sur le vote des aînés, car plus de 2,5 millions des 13 millions d’habitants de l’État ont plus de 65 ans, un bloc électoral clé qui a aidé Trump à gagner en 2016.
Selon un sondage CNN réalisé en mars, quatre électeurs de Pennsylvanie sur dix considèrent l’économie comme leur principal problème, ce qui favorise Trump, qui se concentre sur l’incapacité de Biden à freiner les taux d’inflation élevés.
Nevada : un équilibre délicat : Malgré les victoires démocrates au Nevada en 2016 et 2020, il reste un État pivot. Trump est confiant dans le Nevada car les sondages de fin 2023 ont montré que les électeurs du Nevada font davantage confiance aux républicains pour gérer des questions telles que l’économie, l’immigration et l’éducation. À la mi-juillet, les sondages montraient constamment que Trump devançait Biden.
Les experts s’accordent à dire que le Nevada présente toujours un équilibre délicat dans son électorat, les indépendants constituant plus de 30 % des électeurs. Contrairement à d’autres États, le Nevada permet aux électeurs insatisfaits des deux candidats des principaux partis de sélectionner « Aucun des candidats ci-dessus » sur leur bulletin de vote, une option officielle dans l’État.
Michigan : Le poids des votes arabes et travaillistes : Le Michigan, un État qui avait l’habitude de voter républicain dans les années 1970 et 1980, est maintenant classé comme un État pivot, surtout après que Biden l’ait remporté en 2020. Le Michigan se classe parmi les dix premiers États en termes de votes électoraux, avec 15, ce qui le rend crucial dans la course à la Maison Blanche.
Le Michigan abrite une importante population arabo-américaine, estimée à plus de 211 000 personnes. Harris espère regagner le soutien des électeurs arabes, qui se sont sentis marginalisés par la gestion de la guerre de Gaza par Biden et son fort soutien à Israël.
En plus du vote arabe, les syndicats jouent un rôle crucial dans l’État, Trump et Harris se disputant le soutien des syndicats de travailleurs de l’automobile et de camionneurs.
Bien que Harris conserve une légère avance sur Trump (48 % contre 46 %), les sondages d’août 2024 montrent qu’environ 25 % des électeurs du Michigan restent indécis.
Caroline du Nord : Réduire l’écart : La Caroline du Nord a traditionnellement voté républicain lors des élections présidentielles. Cependant, les marges entre les candidats démocrates et républicains se sont réduites. Avec 16 votes électoraux, l’État se classe parmi les dix premiers, ce qui le rend vital pour les deux partis.
En conséquence, Trump et Harris se sont tous deux fortement concentrés sur l’État. Rien qu’en 2024, Trump s’est rendu trois fois en Caroline du Nord en mars, juillet et août pour des rassemblements de campagne où il a critiqué les démocrates. De même, Biden s’est également rendu dans l’État à plusieurs reprises au cours de l’année.
Intérêt croissant :
Étant donné que les États pivots semblent être le facteur décisif pour la victoire de Trump ou de Harris, les implications de l’intérêt pour ces États sont les suivantes :
Campagnes publicitaires et visites en navette : À l’approche de l’élection présidentielle, les deux campagnes visitent les États pivots et lancent de nouvelles publicités. Par exemple, la vice-présidente Kamala Harris a publié une nouvelle publicité actuellement diffusée dans les États pivots axée sur l’abordabilité du logement. Dans l’annonce, elle promet que si elle est élue, elle construira trois millions de nouvelles maisons et aidera les premiers acheteurs avec des acomptes, les estimations suggérant que l’annonce a coûté environ 150 millions de dollars. De plus, Harris et Walz ont lancé une tournée en bus à travers la Géorgie. Pendant ce temps, l’équipe de Trump a poursuivi sa campagne, accusant l’administration Biden-Harris d’être responsable de l’inflation.
Services spéciaux pour les médias : Des réseaux tels que CBS, NBC, ABC et Fox ont lancé un service de télévision appelé Swing State Election News pour couvrir les nouvelles locales dans les États pivots, reconnaissant leur importance comme déterminants clés dans la course électorale américaine. Ce service diffusera des nouvelles locales dans ces États et suivra de près les activités de campagne dans ces États.
En résumé, le rôle des États pivots dans la détermination du résultat des élections présidentielles américaines ne cesse de croître, soutenu par une polarisation importante entre les partis démocrate et républicain, ainsi que par le nombre croissant d’indépendants dans ces États. Cela suggère que les deux partis sont susceptibles d’allouer plus de ressources et de temps pour obtenir des votes dans ces domaines critiques.
