Partis et systèmes politiques: interactions et fonctions
Lavau, Georges
GEORGES LAVAU Institut d’Etudes politiques de Paris
Toutes les analyses demeurées classiques des régimes et des sociétés politiques – de Tocqueville à André Siegfried en passant par Bryce et Laski – ont consacré de longs développements aux partis politiques de ces sociétés.
Il fut même un temps qui n’est pas si lointain où l’on tendit à considérer qu’une analyse fouillée des partis et du party system fournissait la clé principale, sinon exclusive, des régimes politiques et des caractéristiques de leur fonctionnement, de même qu’elle permettait de passer à leur analyse comparative. Pour ne citer qu’un nom, Maurice Duverger fut, en France, assez représentatif de cette tendance. C’est de cette époque qu’on peut dater la vogue de ces typologies des régimes et des systèmes politiques à partir des party system : régimes à partis uniques ou hégémoniques, régimes à dualité de partis, régimes à pluralité de partis, etc….
Si l’on voulait poursuivre cette périodisation simplifiée de l’analyse politique, on pourrait dire que depuis cinq ou six ans, nous connaissons une nouvelle période caractérisée au contraire par un relatif désintérêt pour l’analyse des partis. Cela n’est pas seulement dû à l’approche behavioralistel, mais plus encore sans doute à l’emploi de plus en plus répandu, dans l’étude des systèmes politiques, de l’analyse structuraliste-fonctionnaliste, de l’analyse systémique et de l’analyse culturaliste. Ce n’est certes pas que, dans les études menées selon ces méthodes d’analyse, les partis politiques soient passés sous silence, mais on ne s’y intéresse que marginalement. Ou bien on ne s’intéressera à eux que dans la mesure où ils ont un comportement significatif à l’égard des exigences fonctionnelles du système politique : or les partis politiques ne remplissent pas tous et, en tout cas, pas nécessairement des fonctions du système. Ou bien les partis politiques seront considérés comme des agents (parmi d’autres et sur le même plan qu’eux) des processus d’interaction qui permettent au système politique de persister et de s’adapter aux changements de l’environnement. Ou bien encore les partis politiques seront traités comme les reflets ou les agents de cristallisation des cultures et des sub-cultures politiques.